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Eloge de Joseph TRAN (décédé le 13/04/14), prononcé lors de la cérémonie religieuse de ses obsèques par le lieutenant-colonel (H) Michel BAIN le mercredi 16 avril 2014 en l'église ND de la Paix de MONTPELLIER.

tran joseph

Je remercie les enfants de Joseph TRAN qui ont bien voulu que je rende hommage à leur papa en ce début de cérémonie.

Nous nous sommes connus lui et moi, en 1990. J'habitais encore à Montpellier, non loin de l'école d'application de l'infanterie. Un après-midi, mon dernier fils est arrivé à la maison avec Joseph, qu'il tenait absolument à présenter à mon épouse :
« Maman, je t'amène un compatriote ! ». Ce qui était faux puisque mon épouse est chinoise, née à Madagascar et Joseph en ce qui était encore l'Indochine française.
Et ce fut le début d'une longue amitié, Joseph allant jusqu'à me considérer comme son frère.

Joseph TRAN, comme beaucoup des plus anciens d'entre vous a eu deux vies.
L'une au Vietnam, de 1940 à 1975, l'autre en France de 1975 à son décès le 13 de ce mois d'avril.

Il est né le 30 avril 1940 à Van Lui dans l'évêché de BUI CHU, au Tonkin. L'Indochine est alors sous protectorat français.

La défaite de la France en mai 1940 face à l'Allemagne confortera le sentiment des élites vietnamiennes que le temps de la présence française arrivait à son terme et que le retour à l'indépendance d'un grand Vietnam était venu. Mais rien ne se concrétisera avant que les japonais ne quittent la région 5 années plus tard, passant le pouvoir à un gouvernement indépendantiste, après avoir humilié les colonisateurs.

La France, malgré tout, assise à la table des vainqueurs, reprendra pied en Indochine, ne voulant discuter d'indépendance qu'en position de force. 8 années de guerre s'ensuivront, guerre de décolonisation, guerre civile, et clairement, à partir de 1950, guerre contre le communisme et pour un état indépendant et libre.

Dans cette tourmente, l'évêché de Bui Chu, comme les autres, tentera de défendre au mieux les intérêts de sa population. Mais le sort des armes est favorable aux forces communistes ; la France, lasse de cette guerre lointaine signe les accords de Genève le 20 juillet 1954 et la fin des hostilités au Tonkin entre en vigueur le 27 juillet.
Tous ceux qui ne veulent pas se soumettre au régime communiste qui se met en place au nord-Vietnam fuient vers le sud. Le jeune Joseph est dans la masse de ceux-là, abandonnant tout pour rejoindre Haiphong et le sud-Vietnam.

Il obtient alors son CAP de mécanicien et travaille pour la société Michelin à Binh Long, non loin de la frontière du Cambodge.

Mais la guerre reprend avec le nord-Vietnam. Le jeune TRAN est appelé sous les drapeaux en 1960. Il rengage et combattra 12 ans dans l'infanterie. Blessé par mine en 1971, il est démobilisé en mars 1972.
Malgré l'hyper-puissance de son allié américain, le gouvernement sud-vietnamien, rongé par les dissensions et la corruption, n'est pas en mesure de s'opposer à la prise de Saigon par les troupes communistes le 30 avril 1975.

Le même jour, Joseph réussit à s'enfuir et se retrouve dans un camp de réfugiés à Hong-Kong.
Il demande l'asile politique à la France qui l'accueille le 24 novembre 1975.

TRAN a 35 ans. Il ne parle pas le français. Soutenu par la communauté vietnamienne et des associations caritatives, il trouve du travail en région parisienne et épouse en 1983 mademoiselle N'GUYEN Thi Ngoc Anh, réfugiée comme lui. De leur union naîtront trois enfants, Christelle, André, Alain.

Dans les dernières années 1980, le couple s'installe à Montpellier à la cité du pas du Loup. Joseph travaille comme bobineur malgré une vue déficiente due à un éclat métallique resté dans un de ses yeux, Anne dans une entreprise artisanale de produits asiatiques. Le 1er décembre 1991, tous deux consacrent leur union dans la religion catholique.
Joseph, très sociable et toujours serviable, reçoit souvent ses amis. Il participe à diverses activités dont celles de l'Amicale des Anciens des Troupes de Marine, heureuse de le compter parmi ses membres, où les anciens « d'Indochine » sont encore nombreux.
Son épouse et lui s'investissent dans l'éducation de leurs enfants, leur transmettant les valeurs traditionnelles : sens de la famille, goût du travail, respects des anciens, langue vietnamienne.
La réussite professionnelle de leurs enfants témoigne de la pertinence de leur éducation.

Les dernières années de Joseph seront obscurcies par la longue maladie de son épouse décédée d'un cancer en mars 2012, un isolement relatif et le mal du pays.

Elles ont cependant été marquées par des joies : le mariage de sa fille aînée Christelle, devenue quasiment sétoise jusqu'en son accent en épousant Gérard PRATO, la naissance de sa première petite fille, Célia, des voyages au Vietnam qui lui ont permis de renouer avec sa famille du côté d'Ho Chi Minh Ville et de Dalat, son dernier voyage un mois avant sa mort en compagnie de ses enfants, étant comme un passage de témoin.

J'ai eu la chance de côtoyer Joseph, presque toujours souriant, avide d'affection et de reconnaissance, industrieux, débrouillard, adroit de ses mains et sachant toujours ce qu'il voulait. Très sensible, il cachait parfois son désarroi derrière « un souci, s'en fout » et un sourire proche des larmes.

Notre Amicale est fière de l'avoir compté parmi ses membres.

Je le remercie personnellement de m'avoir considéré comme un membre de sa famille même si je n'ai pas toujours répondu à ses attentes autant qu'il l'aurait souhaité. Mais je suis sûr qu'il me le pardonne.

A Dieu, Joseph