Articles de "Infos Saint-Cyriennes n°32 - juin 2010"
Reproduits avec l'aimable autorisation du Général de corps d'armée (2S) Dominique Delort,
Président de "La Saint Cyrienne"

 
Edito du Président : 

Drapeau Français 
Paris, le 17 juin 2010
Il y a 70 ans des combats se poursuivaient toujours en France.
L'appel du Général de Gaulle allait être prononcé. Ces jours-ci les Français se souviennent ou pour les plus jeunes apprennent un épisode marquant de cette deuxième guerre mondiale.
J'ai souhaité vous diffuser le texte de Bertrand Paris sur l'engagement de jeunes officiers (Saint-Cyriens ou non) pendant des moments dramatiques de mai-juin 40. Ils sont tombés pour l'Honneur, le leur d'abord et d'une certaine façon le nôtre.
Je veux aussi associer à ce modeste hommage deux autres officiers. Tout d’abord le Capitaine N'Tchoréré exécuté, avec d'autres survivants africains, par des SS après une défense héroïque à la tête de sa compagnie. Mais aussi un lieutenant dont l'histoire n'a pas retenu le nom et qui s'est interposé avec succès entre des soldats allemands et des tirailleurs sénégalais qu'ils s'apprêtaient à exécuter. Un des ces tirailleurs s'appelait Léopold Sedar Senghor, le futur premier président du Sénégal !

Général de corps d'armée (2S) Dominique Delort
Promotion Lt-colonel Brunet de Sairigné (67-69)

 
 
Morts en martyrs de l'honneur militaire 

tirailleur sénégalais 

" Les troupes coloniales françaises se défendirent avec une grande bravoure. Mais nos chars eurent le dernier mot. " (Maréchal Rommel).

La 4ème D.I.C. dont l'infanterie se compose des 2ème R.I.C. 16ème et 24ème Tirailleurs sénégalais, est au nombre des grandes unités que Weygand jette dans la bataille en vue de tenter une percée du flanc ennemi sur la Somme et permettre aux troupes encerclées dans le Nord et en Belgique de rejoindre plus au sud le reste des armées françaises. L'ennemi sait à qui il a à faire et choisit un moyen audacieux pour battre les coloniaux : il enfonce les deux divisions limitrophes qui reculent rapidement, laissant la 4ème D.I.C. quinze kilomètres en flèche. Les panzers n'ont plus alors aucune difficulté pour encercler cette grande unité à pied qui a déjà subi de lourdes pertes depuis plusieurs semaines. Nous sommes dans la nuit du 8 au 9 juin.

Suite aux massacres de prisonniers sénégalais perpétrés les jours précédents, le lieutenant-colonel de NEGREVAL (1914), commandant le 2ème R.I.C. et chef de corps le plus ancien de la division, réunit dans la soirée du 9 juin tous les officiers encerclés dans Angivillers et décide de faire forcer le passage dans la nuit à ce qui reste de la 4ème D.I.C. Des groupes d’une cinquantaine d’hommes encadrés par au moins un officier et un sous-officier européen sont constitués. Il est précisé que les Sénégalais ne doivent être abandonnés en aucun cas. La course perdue d’avance entre les fantassins français et les motorisés allemands se poursuit. Trois sorties sont tentées vers Ravenel au nord, Erquinvillers et Cressonsacq au sud, mais ces dernières localités sont tenues par l’ennemi.

Submergés le 9 juin au bois d'Eraine sur la commune de Cressonsacq, plusieurs groupes des 16ème et 24ème R.T.S. sont capturés après avoir épuisé leurs munitions, voire pour certains tenté une percée à la baïonnette. Les Sénégalais sont sur le point d’être passés par les armes lorsque leurs officiers s'interposent. Ils auront le privilège d’être exécutés avant leurs hommes, d'une balle dans la nuque : parmi eux, le C.B. BOUQUET (13-14) « est mort en martyr de l'honneur militaire toutes ses munitions épuisées sous les feux rapprochés d'un adversaire exaspéré par son héroïque résistance » ; le capitaine SPECKEL (24-26) subit le même traitement, « faisant le sacrifice de sa vie pour sauver ses tirailleurs » ; le capitaine RIS (23-25) est pris le FM 24-29 à la main meurt « en martyr de l'honneur militaire ».

Le capitaine MECHET (29-31) qui avait réussi à forcer le 9 juin est de nouveau rattrapé deux jours plus tard. Avec sept Sénégalais survivants, il « combat jusqu’au bout sans aucun espoir, pour ne pas tomber vivant aux mains de l’ennemi ». Il est tué le 11.

Quant au lieutenant ERMINY (29-31), il est pris mais réussit à s’échapper l’espace de quelques minutes voire quelques heures avant d’être repris et de mourir à son tour d’un balle dans la nuque.

Curieusement, lorsque les autorités de l'armée de l'armistice rédigent les citations à titre posthume, il n'est pas fait état explicitement d'exécutions ou d'assassinats ; le mot ennemi a évolué vers celui d'adversaire. Faut-il voir dans ce politiquement correct avant la lettre une volonté de Vichy de ne pas froisser ses nouveaux amis ?...

Pendant ce temps, quelques groupes ont pu passer et rejoindre les lignes au sud de l’Oise. Seuls une grosse compagnie du 2ème R.I.C., le 3ème bataillon du 16ème et 90 hommes du 24ème répondent à l’appel.

Général (2S) Bertrand Pâris                
Promotion Maréchal de Turenne (1973-1975)